Les élections générales en Allemagne approchent et la chancelière Angela Merkel semble bien partie pour renouveler son bail. Il est vrai que les allemands n’ont guère de raisons de s’en séparer compte tenu de la santé économique du pays ainsi que de la nullité de ses principaux rivaux, à commencer par le très socialiste social-démocrate Martin Schulz. Gouvernera-t-elle seule? Avec les libéraux du FDP qui reviendraient au Bundestag? Reconduite de la coalition pro-UE et incapable de trancher sur des sujets majeurs? L’Allemagne n’a pourtant pas été épargnée par la montée du populisme avec l’émergence de l’AfD qui avait frôlé l’entrée au parlement il y a 5 ans en ratant de peu la barre des 5% offrant des sièges. Il serait crédité de 10% cette fois-ci, la victoire de Merkel sera donc probablement très paradoxale.
Certes l’Allemagne va bien économiquement. Contrairement à tous les économistes de télévision bidons et sociologues marxistes qui pilulent et se lamentent ici, sur la prétendue précarité des travailleurs allemands par example, le discours alternatif de Schulz ne prend pas, il doit bien y avoir une solide raison. Toutefois il est assez étrange que les autres sujets potentiellement chauds ne soient pas exploités pour déstabiliser la chancelière : sa gestion déraisonnable du cas de la dette grecque et des flux migratoires notamment. Depuis au moins 2 ans nous avons eu d’un côté une volonté farouche de sauver l’€ au prix d’un renflouage régulier des grecs et de l’autre une absence despotique de concertation avec ses voisins sur les flux de migrants*. Avec d’abord des agressions, parfois sexuelles comme à Cologne, puis l’Allemagne fait face comme en France, en Espagne ou au Royaume Uni à des actes terroristes low cost qui montrent au passage que le lien entre participation au sol à des conflits au Moyen Orient, et, représailles de terrorisme islamiste est plus que mince que prévu. Ajoutons en plus les tensions qui vont crescendo entre le pouvoir allemand et le proto-dictateur turc au jeu trouble (j’abats un avion russe, je deal le pétrole de l’EI, je rançonne l’UE pour subitement contenir les flux de « réfugiés« ).
Il faut croire que l’Allemagne s’accommode fort bien de cet € sous-évalué (il remonte mais bon, nous sommes loin de ses plus hauts face au $) et des institutions bruxelloises pour que les sujets de discorde contre la chancelière n’aient un poids suffisant. De passage à Berlin pour rencontrer les membres de l’AfD, l’indépendantiste Nigel Farage délivre comme d’habitude un remarquable exposé sur la situation chaotique en Europe et à quel point le politiquement correct en ayant stérilisé les débats nous fait courir un danger mortel.
Rien de bien nouveau dans son discours sauf des propos mesurés qui lui valent apparemment l’ire de la frange xénophobe de l’AfD comme d’autres militants de partis euro-sceptiques comme le PVV hollandais au sujet de l’Islam. Farage semble vouloir endosser le rôle de précurseur avec son Brexit réussi pour propager son catéchisme hors des frontières britanniques. Lorsque j’avais relayé sa conférence donnée en Suisse, son objectif était visiblement de s’inspirer de la démocratie directe et de l’application résolue du principe de subsidiarité dans l’organisation du pouvoir. Aller voir l’AfD sans reconnaître une solidarité claire relève clairement d’une autre ambition. Les négociations entre l’UK et l’UE semblent pâtir lourdement de l’impréparation britannique et de l’intransigeance des technocrates bruxellois, le hard brexit. Puisque Farage avait pronostiqué que le Brexit allait être le point de départ d’une dislocation de l’UE, je me demande s’il n’est pas en train de vouloir hâter cette dislocation. Il n’est plus le chef de UKIP, mais il parcourt l’Europe, et, partout il insiste sur l’impossibilité de transferts entre états membres de la zone € (rendant cette monnaie mort-née) et que l’UE est une machine à broyer le meilleur support de la démocratie à savoir un état souverain et libre. L’UE ne supportant pas qu’un ancien membre puisse nager paisiblement dans l’océan de la mondialisation alors elle freine des quatre fers au mépris des intérêts des peuples, révélant sa nature inquiétante. Farage a peut être compris que le Brexit ne pourra pas avoir lieu sans l’effondrement de l’UE…
Farage expose ici deux idées pertinentes qui méritent un examen. La première part d’un constat : aucune démocratie libérale n’a fait la guerre à une autre. Lire Philippe Simonnot pour découvrir que la France en 1914 n’avait pas les fesses plus propres que l’Empire allemand. L’UE « c’est la paix » c’est bâtir un truc de fonctionnaires pour des fonctionnaires sur un mensonge, ça part mal, et, c’est surtout oublier qui s’est doté de l’arme de dissuasion et le demi-million de GI’s cantonnés en Allemagne. La seconde c’est que 2 murs se sont érigés progressivement du fait de la volonté d’effacer les Etats- Nations. Le premier, une division Nord/Sud avec l’€ qui broie économiquement les pays socialistes du Sud insuffisamment flexibles pour adapter tous les prix à cette monnaie « chère ». Le second, Est/Ouest entre pays ravagés par la dictature du politiquement correct qui fait abandonner la civilisation au profit du multiculturalisme et honni dans les anciens pays communistes qui renoncent à abandonner les vertus de l’homogénéité qui leur a permis de survivre à des privations abominables et à une horrible répression. L’Europe est donc désormais coupée en 4. Notre beau président peut avancer de jolis projets résumés par de jolis slogans comme « Pas plus d’Europe mais mieux d’Europe« , hélas la technocratie européenne n’aime pas trop et préfère balayer d’un revers de main le résultat des référendums et blâmer des dirigeants qui semblent plus à l’écoute de leurs populations. L’UE a ses bienfaits quand elle ouvre à la concurrence et régule le secteur banquaire mais sa propension a étendre son pouvoir sans vrai contrôle démocratique des peuples va sceller sont sort. L’épilogue m’est ainsi apparu il y a exactement 2 ans. Ne me posez pas la question « Quand », je n’en sais rien, mais mon pronostic sur la dislocation de l’UE est plus que jamais inébranlable.
* les fameux réfugiés de Lesbos (allez sur google maps si instructif)