Au pays du vivrensemble, il ne se passe pas une seule semaine sans sa polémique à la con. L’affreux polémiste réactionnaire en chef revient donc sur toutes les ondes et toutes les télés, malgré la fatwa dont il se dit victime, pour présenter son nouvel opus suintant la nostalgie de sa chère et douce France agonisante. Le contenu n’a que peu d’importance, c’est l’emballement médiatique absurde qui nous renseigne sur l’évolution le plus sur les actuels débats de société. La décrépitude tant morale qu’intellectuelle de la gauche évidemment, mais surtout sa profonde bêtise à ne pas avouer que le vilain réac joue avec ses propres codes infâmes qu’elle nous a imposé.
Dès le démarrage de sa séquence de promotion, Eric Zemmour déclenche le buzz en « clashant » une chroniqueuse dont le talent et les raisons de sa présence sur un plateau de télévision ne doivent probablement que très peu à son érudition ou à ses aptitudes à débattre. En cause : son prénom africain sub-saharien qui trahirait de la part de ses part de ses parents leur volonté manifeste de dénigrer la culture d’accueil. Vieille marotte zemmourienne déjà entendue par le passé, soit dit en passant. Il semble aussi que le polémiste recycle d’autres anciennes idées sur Pétain ou son Algérie perdue comme si pour lui, il faudrait y voir une certaine noblesse en tant qu’antériorité condescendante sur une mouvance en gestation, la francisation de l’Alt-Right américaine. Il l’inspire de toute évidence par son rejet complexe du progressisme et d’une partie du libéralisme mais refuse d’en assumer le leadership intellectuel en rabâchant ses obsessions sur un passé dont la jeunesse se moque éperdument.
Le cas algérien est cependant plus intéressant notamment la polémique sur l’assassinat d’Audin. La France est sommée de toute part de se repentir, exercice auquel nos élites politiques et intellectuelles se plient volontiers, à commencer par l’actuel chef de l’Etat, ce que manifestement ses prédécesseurs avaient refusé de faire. Il est toujours savoureux, sinon sain, de rappeler que celui qui avait reçu la francisque des mains de Pétain et ordonné les pouvoir spéciaux en Algérie, ouvrant la voie à la torture, François Mitterrand donc, était naturellement peu disposé à reconnaître la culpabilité de la France dans la déportation des juifs ni à s’excuser pour les crimes commis avant les accords d’Evian tandis que le FLN s’était rendu coupable d’aussi atroces après. Peut être que Zemmour l’a écrit, je ne l’ai pas entendu le dire hélas, à la lumière historique une interrogation me taraude au sujet de l’Algérie : Macron parle-t-il au nom de la France à tous les français d’où qu’ils viennent et quel que soit leur rapport avec l’Algérie ou seulement à certains? Précisons les choses… Macron, comme avant lui récemment à gauche, ne chercherait-il pas à expier les fautes de la gauche française? Rappelons-nous des quelques maigres grincements de dents quand François Hollande, une fois élu, a rendu hommage à Jules Ferry malgré ses écrits (abominables selon le vivrensemble) sur la colonisation. Hollande, l’homme des discours creux, enrobés de moraline dégoulinante et abjecte sur le nécessaire vivrensemble que les gaulois récalcitrants abhorrent avec en tête l’élite socialiste. Macron ressemble furieusement à Hollande là dessus, avec un peu plus de panache et étant plus télégénique, il nous invite lui aussi à renoncer à la civilisation pour le tribalisme pour d’infâmes calculs clientélistes. Jamais personne et, surtout pas de l’éducation nationale, ne m’a expliqué pourquoi les figures du libéralisme et du Bonapartisme sous les traits de Louis-Philippe et Napoléon III se sont inquiétés de l’Algérie sans engager de politique coloniale. Dommage. une des vertus oubliées de la civilisation occidentale consiste à établir et circonscrire précisément les responsabilités. Le socialisme vise inconsciemment voire ouvertement à les diluer dans un collectif abstrait. C’est si pratique pour se dédouaner, dissimuler et au final, mentir.
Cette question algérienne est toujours prégnante parce qu’au nom du toujours vivrensemble, sommet de l’illusion égalitariste, de l’hypocrisie socialiste et du constructivisme sociétal, au lieu d’être balayée par l’histoire, elle sert avant à tout à culpabiliser. Le sentiment de culpabilité étant le nouveau vecteur hyper efficace pour faire avaler de drôle de pilules, les écolos politiques pourtant si faciles à contrer sur le plan scientifique peuvent en témoigner. Dans cet éternel combat opposant raison et passion, Zemmour a choisi lui aussi son camp. Et ce n’est pas celui de la raison, et il l’assume d’ailleurs, il le sait, il a compris les ressorts maléfiques du socialisme non pour les dénoncer, réfuter l’incroyable régression intellectuelle qu’il encourage, il s’en nourrit. Comment devrais-je lui donner tort là dessus? Zemmour a pigé comment fonctionnait la mécanique médiatique, comment faire vendre en librairie ses idées.
Les « artistes » contemporains ont bien compris ce que les progressistes aimaient : choquer les âmes sensibles conservatrices et réacs avec de la transgression à deux sous. « Piss-Christ » le « vagin de la Reine » ou l’arbre de Noël de la place Vendôme. Ils ont pour eux le politiquement correct ce qui les exemptent d’avoir du talent tout en assurant leur fortune matérielle. Zemmour choque les âmes sensibles de gauche et leurs chimères en invoquant le passé et sa très particulière interprétation de l’histoire. Il est intéressant de constater sur quel sujet et sur quel angle le buzz se crée car Zemmour ouvre plusieurs portes possibles. Au final la pauvre auditrice des grandes gueules de RMC d’origine maghrébine qui pense « qu’il n’a pas de valeur ajoutée aux débats » se trompe doublement : en appelant à la censure, elle répond de manière liberticide comme une vulgaire socialiste ayant perdu un débat intellectuel, faits présentés froidement sous le nez. Elle se trompe aussi parce que les gens qui tentent de répondre à Zemmour en défendant les arcanes du politiquement correct ne vendent pas 10% en librairie ce que Zemmour s’apprête à vendre. Malgré mes divergences de point de vue, je reconnais le talent indéniable du polémiste qui vomissant la gauche en a compris assez le fonctionnement pour exploiter sa paresse intellectuelle, ses facilités, son inconséquence mortelle. Les réactions outrées des gardiens d’un temple en lambeaux m’amusent, en cela je suis assez admiratif.