La liberté d’expression a toujours été un test pour les ennemis de la liberté quels qu’ils soient.   

J’avais écrit en fin de semaine dernière un billet pour livrer mes impressions critiques sur les derniers développements sur l’ignoble attaque terroriste qui avait frappé les caricaturistes de Charlie Hebdo et la prise d’otages dans une supérette casher. Or depuis, j’ai pu lire toutes sorte d’articles écrits même à chaud qui détaillaient bien mon ressentiment personnel : Je ne suis pas Charlie non pas parce que je me sens loin intellectuellement des gauchistes libertaires qui tiraient à vue animés d’un anticléricalisme aussi puéril que leur angélisme finalement mortel envers le multiculturalisme, encore moins parce qu’il me semblait inapproprié de critiquer une religion et ses symboles. Non. J’ai juste la conviction que c’est le comportement moutonnier des hommes prompts à s’émouvoir collectivement qui a mis en danger les libertés, c’est la leçon du XXème siècle, ou comment une minorité active a réussi à retourner et exploiter les faiblesses d’une majorité passive. Or la prétendue majorité déterminée de la manifestation du dimanche 11 janvier porte en elle les germes des divisions futures car derrière l’unité de façade, récupérée politiquement avec la bénédiction des médias, ressemble assez à une grande messe avec des prêches politiquement corrects pour de fidèles athées ou des gens se pensant modérés car ils gobent toute propagande et rechignent à se lever dès lors que le mot d’ordre n’est pas plébiscité par les médias dominants. Dès le lendemain, on se demandait s’il fallait un « Patriot act » à la française : On sait que la liberté des américains a été sacrifiée soi-disant sur l’autel de la surveillance des vilains barbus et comme effet « indésirable » on est allé – par accident je suppose – espionner la conversation de la chancellerie allemande. J’imagine sans peine que l’extraordinaire sécurité, enviée de tous, régnant aux plus sommets de l’état français nous a épargné ce regrettable effet de bord… Pour finir, qui peut oser affirmer que le « Patriot Act » a protégé les américains d’attaques terroristes, sur leur sol ou ailleurs ?

Tentation #1 politiquement dangereuse : Attendre que l’état fasse le ménage. Si ménage doit se faire, c’est aux musulmans pour leur intérêt qu’il revient de le faire.

Attardons-nous sur les USA, le premier article de la constitution est parfaitement clair et est un des sommets si ce n’est l’achèvement de la pensée libérale, inspirée des lumières françaises, ne l’oublions jamais :

« Le Congrès ne fera aucune loi relative à l’établissement d’une religion, ou à l’interdiction de son libre exercice ; ou pour limiter la liberté d’expression, de la presse ou le droit des citoyens de se réunir pacifiquement ou d’adresser à l’État des pétitions pour obtenir réparations des torts subis. »

Relisez-le. Mesurez que tant qu’il est respecté, aucune dérive comme l’installation d’une pensée officielle qui sévit  lourdement en France n’est théoriquement possible. La liberté d’expression est totale et non entravée par des juristes zélés qui décident de l’histoire officielle ou de ce qu’il est admis de dire ou ce qui relèverait du concept aussi flou que fourre-tout de « l’incitation à la haine». Si nous vivions dans une démocratie garantissant la liberté d’expression totale, jamais les lois Pleven et Gayssot n’existeraient. Alors oui, jamais les disjonctés comme Soral et Dieudonné ne seraient inquiétés par la justice pour leurs propos délirants. Auraient-ils pu faire commerce de leurs propos tantôt controversés tantôt haineux ? Autant de gens faibles les considéreraient-ils comme des martyrs des médias ?

La liberté n’est pas sécable comme un vulgaire cachet d’aspirine : La liberté d’expression doit être totale ou alors le débat sera éternellement bridé accouchant de fausses solutions.

Plutôt que de poser l’épineuse question de la solubilité de l’islam dans les démocraties occidentales qui n’ont plus de libérales que la façade tant les politiciens sont gangrénés par le capitalisme de connivence leur assurant leur réélection et donc leur carrière, examinons le cas américain et les prétendues offenses commises envers la religion chrétienne. En 1990 une vague de puritanisme toujours aussi hypocrite qu’incongrue vis-à-vis du premier article s’est abattue. Sans interdire, les autorités américaines ont fait placarder sur les CD de musiciens considérés comme « boderline » un sticker avertissant le publique de la dangerosité des paroles : « Parental advisory explicit content ». Les élus républicains très contents d’eux n’imaginaient pas que cette « labélisation » fournissait une publicité supplémentaire… Toute leur connerie était exposée. Comme si les parents devaient écouter les CD de leurs ados pour leur signifier, attention, les paroles ne sont pas bisous… Risible.

N'achetez-pas c'est caca! Ou comment tous les rappeurs et groupes de musiques extrêmes se sont vite engouffrés dans cette connerie!

N’achetez-pas c’est caca! Ou comment tous les rappeurs et groupes de musiques extrêmes se sont vite engouffrés dans cette connerie!

Le ridicule a touché le fond en 1990 dès lors qu’un groupe de heavy metal britannique fut traduit en justice pour s’expliquer des parole d’une chanson datant de 1978 (une reprise en fait) qui aurait soit disant poussé au suicide des adolescents complétement paumés. La quarantaine passée, les membres de Judas Priest, au nom évocateur pour les plus barrés des républicains, durent s’expliquer. Rappelons que le groupe formé en 1971 de prolos des Midlands près de Birmingham ne chantait pas la paix et l’amour dans une Angleterre agonisante des années 70 qui avait vu dans cette région industrielle sinistrée des groupes émerger au talent et à l’influence musicale extraordinaire : Citons juste au passage Led Zeppelin, Deep Purple et Black Sabbath. Ces derniers, avec le légendaire Ozzy Osbourne au chant avaient accepté la suggestion de la maison de disque qui éditait leur premier disque en 1970 d’apposer une croix sur le vinyle. En tournant, celui-ci se retrouvait en position inversée la moitié du temps… Les pochettes suivantes virent d’autres provocations explicites: « Sabbath Bloody Sabbath » de 1973 avec un superbe « 666 » en tête de gondole ou « Sabotage » de 1975 où les « S » étaient écrits avec la typographie germanique laissant ouvertement apparaître un « SS ». Le groupe Black Sabbath était –il ouvertement nazi et sataniste ? Non c’était une pure volonté commerciale de choquer car au beau milieu de la période « Flower power » hippie, ce groupe de rock était noir dans les textes, l’attitude, et musicalement l’un voire le plus influent car inspiré et talentueux mais dénigré par la critique de l’époque. Le vent de liberté musicale et culturel qui a soufflé depuis 1966/1967 à la fin des années 80 a testé les démocraties occidentales, bien avant le fondamentalisme musulman. Le socialisme s’imposant de plus en plus, les entraves à la liberté d’expression apparurent bien avant les provocations au quotidien et les exactions sanguinaires des islamistes et la réponse de l’occident était déjà mauvaise à cette époque.

Et même s’il y avait eu « do it » comme message subliminal, étaient-ils responsables des actes de jeunes paumés? Où va-t-on dans la déresponsabilisation des individus?

L’islam est au centre des discussions actuelles mais en tous temps, partout, les esprits les plus conservateurs, les puritains et les socialistes ont cherché à imposer leurs vues, leurs coutumes, leurs mœurs aux autres. C’est une constante humaine de céder au prétendu confort qu’apporterait la tyrannie et de redouter la liberté. Les fondamentalistes religieux qui testent les démocraties savent peut être qu’elles ont toujours eu en elles cette faiblesse congénitale de réagir en restreignant les libertés et que seuls des hommes visionnaires et courageux arrivent à enrayer cette mécanique destructrice.  Voir un gouvernement dont les membres se posent comme étant les défenseurs de la liberté d’expression aujourd’hui  tandis qu’ils étaient les censeurs d’hier risque fort d’encourager cet extrémisme : Les socialistes d’aujourd’hui n’ont rien à voir avec leurs ancêtres qui avaient eu la peau du catholicisme et il y a fort à parier qu’ils se coucheront face à l’islam tout en restreignant les libertés publiques.

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A propos Duff

Ingénieur consterné par le monde dans lequel il vit...
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10 commentaires pour La liberté d’expression a toujours été un test pour les ennemis de la liberté quels qu’ils soient.   

  1. zelectron dit :

    Les socialistes d’aujourd’hui n’ont rien à voir avec leurs ancêtres qui avaient « eu » la peau du catholicisme (à effacer après correction?)

  2. zelectron dit :

    « il y a fort à parier qu’ils se coucheront face à l’islam tout en restreignant les libertés publiques » -effectivement entre la takiya islamiste et les mensonges socialistes il y a une similitude troublante
    -ainsi que la charia v/s l’ordre socialo-fasciste !

  3. bebert4 dit :

    Les musulmans sont prédisposés au socialisme,en islam l’individu compte peu ,on est juste un atome de la oumma ,la mort guette celui qui s’en écarte.L’islam (soumission) crée une soumission à l’autorité et un fatalisme.Un musulman peut difficilement pencher vers le libéralisme,doctrine purement occidentale.
    Le socialiste ou plutôt clientéliste recherche des électeurs captifs et dépendant;des populations sans intérêt économique en demande d’assistanat,pétries de mentalité victimaire (la victimisation est entretenue par tous:médias ,éduc nat, politiciens.)L’esprit victimaire est à l’opposé de la responsabilisation base du libéralisme
    Les musulmans ,quand ils seront en position de force se débarrasserons des idiots utiles socialistes, en termes d’idéologies c’est l’union de la carpe et du lapin.

    • Duff dit :

      Bonsoir,

      A vous aussi je devrais vous rappeler la consigne officielle, indiscutable et horizon actuellement indépassable de la politique politicienne française: « Pas d’amalgame! ». Quelques discussions sur le net et autour de moi m’ont renforcé dans la conviction que même les musulmans bien intégrés et ouverts d’esprit sur bien des sujets se referment comme des huîtres comme s’il était anormal qu’en France le délit de blasphème n’existât pas.

      Au fond personne n’ose le dire par la terreur provoquée par l’absence d’une vraie liberté d’expression qui pourrait être salvatrice et non uniquement porteuse de messages haineux : Les musulmans pourtant très hostiles à la pédérastie étaient notoirement absents de la Manif Pour Tous (que je ne soutenais pas pour être clair sur le sujet) tout comme du rassemblement du 11 janvier. Comme je le mentionne au sujet de la première vidéo, je juge utile pour les musulmans de France de s’impliquer dans le ménage à faire parmi leurs brebis galeuses, se désolidariser de leurs éléments radicalisés en joignant les autres communautés fermement attachées à la France. C’est leur intérêt même avant d’être aussi par ricochet celui de la communauté nationale.

      L’unité magique est merveilleuse, intéressante et rassurante sur certains points mais soulignent aussi les difficultés inquiétantes des « modérés » à se désolidariser des extrémistes. Comme certains libéraux ostracisés dès qu’on aborde la question, je pense en effet que l’absence de distance entre le temporel et le spirituel fait de la religion musulmane le monothéisme le moins libéral. L’incapacité des pays musulmans à s’ouvrir au monde surtout s’ils n’ont pas de pétrole à vendre n’est nullement le fruit du hasard. C’est l’enjeu des décennies qui s’ouvrent.

      Les élites protégées, subventionnées, planquées à Paris et proches du pouvoir peuvent toujours nier le réel, celui-ci se rappellent à nous et il est violent. L’assimilation de l’islam en France va connaître des étapes plus que tumultueuses. Le 11 janvier 2015 rappellera longtemps au français que l’excès de confiance confine à l’aveuglement et donc au sur-place sur les question essentielles posées par l’émergence très rapide d’une religion antilibérale sur notre sol questionnant par ses factions extrémistes les fondements de notre démocratie.

      Cdlt

      • bebert4 dit :

        Autoriser les fonctionnaires a être élus est à la base de l’oligarchie actuelle.

      • Duff dit :

        @bebert4 oui en partie. Les institutions aussi et la connivences entre les politiciens effroyablement nuls en économie qui récitent leurs programmes soufflés par leurs amis « grands patrons » qui ignorent l’entrepreneuriat, la prise de risque et les bienfaits économiques et spirituel de la concurrence.

  4. zelectron dit :

    C’est un choix ou fonctionnaire ou élu, on ne peut pas être juge, arbitre et jouer la partie tout à la fois, c’est le drame de cet état français qui se mêle de tout et ne termine rien en passant par toutes les séries de décisions plus abscons les unes que les autres. Il devrait en tout premier lieu être interdit à l’état d’avoir une quelconque participation dans une entreprise quel qu’elle soit !

  5. francoiscarmignola dit :

    Oui mais le problème est plus compliqué que ça. Il faut différencier liberté d’expression et facilités à inciter.
    La liberté d’expression est utilisée par les blancs et consiste à blasphémer de diverses manières pour inciter les gens à abandonner leur religions, tandis que la facilité à inciter est utilisée par les religions pour répandre leurs superstitions. Il y a aussi bien les déconneurs et les bigots qui n’ont jamais fait de mal à personne. Charlie Hebdo, clairement engagé en politique, est entre blasphème et déconne, ramadan entre islamisme et bigoterie. Cabu était un déconnant (un peu pacifiste, mais toujours sympathique, il me manque beaucoup).
    De manière générale, je suis contre toute censure, mais me réserve le droit de critiquer toute expression, justement pour cette raison. Et de juger des nuisances de telle ou telle.
    D’autre part, l’Etat, qui a le monopole de la violence, ne doit pas s’empêcher lui même de protéger les citoyens. Considérer des terroristes fanatiques comme de simples délinquants et leur donner des emplois publics ou des bracelets électroniques pour les réinsérer me parait critiquable et cela n’a rien à voir avec la liberté d’expression.
    Les manifestions religieuses publiques avec allusion (dans des prêches, c’est de l’appel à la croisade) à des conquêtes militaires nécessaires par exemple en palestine ne sont pas de la liberté d’expression mais de l’appel à tuer des citoyens Français juifs.
    On condamne Dieudonné qui est un humoriste et on laisse des pseudos imams quasi recruteurs parler de géopolitique internationale dans un décor religieux propre à susciter, ou pire, à excuser tous les fanatismes.
    C’est pour cela qu’il faut empêcher ou restreindre certaines pratiques et définir un espace public neutre commun à tous en plus des espaces d’expression public privatisés.
    On se met en maillot de bain à la piscine, pas dans la rue. C’est le principe.
    Ainsi, pas de voile dans les universités, et pas de mamans voilées auxiliaire des écoles.
    Pas de journée de la laïcité à l’école et pas d’enseignement de l’homosexualité militante non plus.
    Bref, une laïcité dure qui tape dans tous les sens.
    Quand aux moquées, elles sont clairement dans l’espace public, tout le monde peut y entrer, et le maillot de bain y est interdit.
    Pour les espaces publics privatisés (les journaux, les piscines, les partis politiques) l’Etat a le droit de se renseigner surtout quand il a des raisons de le faire. Il n’était sans doute pas opportun d’écouter le canard en 73, mais bon, il y a eu des opportunités de violence à cette époque et c’est la gloire de ces fanatiques là (mao, trostkistes etc bref, nos ministres et recteurs d’aujourd’hui) que n’y avoir pas cédé. Dommage on les aurait dégommé par avance.
    Il y a aussi l’espace privé pur, et bien il ne me choque pas que des criminels violents, voire des nazis fanatiques soient un peu espionnés avant qu’ils ne passent à l’acte, et je reprocherais plutôt à Valls et sa clique de ne pas l’avoir fait assez: les écoutes des Kouachi que Valls a refusé de faire peu avant l’attentat étaient parfaitement nécessaires et n’auraient pas violé mes droits.

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